Pitch toujours !
Roulement de tambour, attention, top chrono ! Vingt candidats vont s’affronter demain lors de la finale internationale du concours « Ma thèse en 180 secondes », à Rabat. Lancée en 2014, la compétition connaît au fil des années un succès grandissant : sur place, les finales régionales remplissent désormais les amphis et sont relayées dans les médias locaux, tandis que les résultats des finales nationale et internationale sont largement repris dans les médias nationaux.
La Conférence des présidents d’université et le CNRS comptabilisent ainsi 20 articles de presse, sept télés et une radio pour la finale internationale 2015, et déjà 18 articles de presse, trois télés et une radio pour la finale française 2016. La vidéo de la prestation de Mathieu Buonafine, qui représentera la France à Rabat, tourne sur les réseaux sociaux, cumulant 40.000 vues sur YouTube.
Ecoles et universités ne boudent pas leur plaisir car ce n’est pas si fréquent que l’on s’intéresse aux recherches menées dans leurs laboratoires – ni à l’inverse, malgré des initiatives comme la fête de la science, que les chercheurs s’attachent avec autant de bonne humeur à vulgariser leurs travaux. Et ce, dans un format court qui va à l’encontre des habitudes du milieu, plus enclin à produire des articles de plusieurs dizaines de pages qu’à rédiger des tweets en 140 signes.
Or, la forme n’est pas pour rien dans la popularité de MT180 qui a fait des émules, notamment dans les Espé (Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation) : après les doctorants, les futurs enseignants se sont prêtés à l’exercice au printemps dernier avec « Mon mémoire MEEF en 180 secondes ».
Un format emblématique de l’open innovation
Le pitch est à la mode, dans les startups comme dans l’éducation. Et évidemment dans le monde des startups de l’éducation. Il en est même sorti un concept : « Edupitch » qui désigne des soirées organisées par le Lab de l’éducation pour permettre à des entrepreneurs de venir présenter leur projet de startup devant des enseignants.
Loin de dénoter un manque de profondeur du XXIe siècle, que ne manqueront pas de dénoncer les mauvais esprits, le pitch illustre cette tendance à rassembler, sur un temps assez court, des personnes qui partagent un intérêt commun, pour faire émerger des idées ou faire avancer des projets. Sur le modèle des « sprints » en informatique, largement utilisés pour développer des logiciels libres, les pitchs s’inscrivent dans une démarche d’innovation ouverte et de collaboration, qui n’exclut pas la compétition. Autant de valeurs partagées par le monde de la recherche académique.
7 Responses
La vacuité et la densité de novlang du dernier paragraphe sont dignes du chef d’oeuvre. Du meme niveau que ces demarches sans aucun intérêt.
Je lis “pitch” et “sprint”. Effectivement, c’est dense. Énorme même.
Bref vous ne comprenez peut être pas l’intérêt de vulgariser un travail de recherche de pointe de 3 ans (voire plus), mais évitez les raccourcis.
Mon commentaire va valoir pour tous les “han ouais classique les jeunes deviennent bêtes et une thèse se résume à 3 minutes de présentation”
NON. C’est une manière d’aborder le résumé, une porte d’entrée vers tout le travail derrière. Et en plus de ça c’est un exercice de prise de parole, de défense d’un projet. Finalement, c’est une manière de présenter au public néophyte des travaux intéressants dont ils n’auraient jamais entendu parler. A l’heure où les gens se font bourrer le crâne de burkinis et de relance de métallurgie dans le Nord, n’est-ce pas là une bouffée d’air frais qui permet d’élever un peu le niveau?
Vous m’ôtez les mots de la bouche ! Ce travail de vulgarisation est d’autant plus important que le public se demande ce qui se passe dans nos labos et ce que font les chercheurs de l’argent public dans leur tour d’ivoire… En même temps, quand on voit le taux de fréquentation des labos et instituts lors des journées portes ouvertes on comprend mieux d’où sortent les critiques, du néant…
Ce n’est pas être « mauvais esprit » que de penser que ce genre de pratique nouvelle, dont la superficialité est effectivement un élément-clef, est bien caractéristique de notre époque ; il s’agit là d’un constat fort neutre. Quant à croire que les « pitchs s’inscrivent dans une démarche d’innovation ouverte et de collaboration », on ne peut que se demander quelle pourrait être la réalité tangible accordée à ces termes vides de sens… Pas besoin de beaucoup d’effort intellectuel pour constater que le « pitch » façon « startup » est bien loin de ces termes consensuels de façade. Le cas de MT180 est différent en ce sens que la perspective « business » n’est pas directement présente, mais il faut justement déplorer que les formes de celles-ci parviennent malgré tout à envahir un milieu qui jusqu’à présent s’en protégeait plus ou moins (pour son propre salut), et s’interroger sur la nécessité contemporaine de rendre la recherche scientifique « simple et sexy ». La vulgarisation n’a pas attendu les « TED Talks » pour exister, sous des formes — on l’oublie facilement maintenant que le « pitch » est partout — variées, et à bien des égards plus « efficaces ». Bien sûr, tout dépend de ce que l’on entend par cette efficacité, mais si vous pensez que présenter un sujet de thèse de doctorat en 180 secondes à grands coups de métaphores plus ou moins réussies participe à une « innovation ouverte » et une « collaboration », vous vous mettez assurément le doigt dans l’œil.
wowowow, tout doux Bronco!
Mouais, symptomatique du temps présent.
Pas le temps d’expliquer, d’élaborer ou d’aller plus loin. Expliquer une thèse en quelques minutes = Google-isation des esprits.
Je reste sceptique, pour le moins.
D’autre part:
“Sur le modèle des « sprints » en informatique, largement utilisés pour développer des logiciels libres”
Alors non, pas vraiment. La plupart des logiciels libres ne sont pas développés avec des “sprints” et des méthodes agiles.
S’agit-il d’un concours d’enfoncement de portes ouvertes ? Il me semble que tout au long de mon doctorat, ma capacité à synthétiser de manière attractive et intéressante mon travail a fait partie de mon évaluation. Quand j’ai été capable de susciter l’intérêt de chercheurs connus me demandant de faire partie de mon jury, mon directeur a estimé qu’il était temps que je boucle mon travail et que je soutienne…
Super vidéo !