Mooc : après la révolution, l’âge de raison
« Le Mooc de l’année » : c’est le nom du concours qui vient d’être lancé et désignera, le 19 janvier 2017, les meilleurs de ces « cours ouverts en ligne massifs ». Organisée par MyMooc, une plateforme qui se veut « le trip advisor » des Mooc », en partenariat avec le journal du net, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et Google France, cette compétition vise à « récompenser les acteurs de la formation digitale », universités et grandes écoles, mais aussi start-up et grandes entreprises. Doit-on y voir le signe d’une institutionnalisation de ce nouveau mode de formation ?
Entre Mooc-mania et abandon
Quand ils ont débarqué en France, en 2012-2013, les Mooc (Massive open online courses) ont suscité un profond enthousiasme des universités et des écoles qui y voyaient l’occasion d’étendre leur rayonnement en touchant des publics bien plus larges que leurs traditionnelles cohortes d’étudiants, notamment sur le continent africain. Les Mooc étaient présentés comme une révolution sans précédent, qui allait enfin démocratiser l’accès aux connaissances.
Comme souvent, l’emballement a été suivi de critiques, aussi acerbes que les attentes étaient fortes. Il faut dire que certains établissements ont surfé sur la vague et diffusé des cours bien peu interactifs, qui se réduisent en réalité à des vidéos plus ou moins séquencées. Au-delà de ces effets pervers, l’argument le plus sérieux des anti-Mooc concerne le fort taux d’abandon puisque moins de 10 % des inscrits vont jusqu’au bout de la formation. Certes.
Cependant, ce chiffre doit être mis en regard de l’objectif des participants. C’est notamment ce que souligne le chercheur Matthieu Cisel, qui a consacré une thèse à ce sujet. S’il s’agit véritablement d’acquérir des compétences et d’obtenir une attestation, voire une certification, alors l’abandon est en effet synonyme d’échec. Mais les motivations des Internautes sont plus larges, allant de la simple curiosité pour la thématique générale, à l’envie de picorer des connaissances sans s’astreindre à un rythme de travail hebdomadaire.
Ni graal, ni gadget
Aujourd’hui, malgré ce questionnement autour de l’efficacité pédagogique des Mooc, et malgré leur coût de production qui avoisine les 50.000 euros, ceux-ci ne disparaissent pas du paysage, loin s’en faut. De nouveaux cours continuent d’être mis en ligne par les écoles et universités. De l’économie circulaire à la physique quantique, en passant par Oscar Wilde et les enjeux politiques des migrations internationales, de nouveaux Mooc continuent de s’ouvrir sur la plateforme FUN (France université numérique). Lancée en 2013 par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, celle-ci revendique, sur les trois années, plus de deux millions d’inscrits aux quelques 200 cours proposés par la cinquantaine d’établissements partenaires.
Ni graal de la formation, ni gadget technologique, les Mooc sont en passe de trouver leur juste place dans l’enseignement supérieur. Pour les écoles et universités, ils constituent d’abord une vitrine des connaissances détenues et diffusées par leurs enseignants-chercheurs. En outre, ils permettent d’expérimenter de nouveaux formats de cours, plus interactifs.
Certains enseignants intègrent aussi désormais des Mooc dans les formations qu’ils dispensent aux étudiants. De massifs et ouverts, les cours deviennent alors petits et privés : ils se transforment en « Spoc » (Small private online courses). Les modules destinés aux salariés, quant à eux, ont donné naissance à un autre acronyme, le « Cooc » (pour Corporate open online courses), utilisés par de grandes entreprises comme Renault, Bouygues, la SNCF ou Pernod Ricard.
Ces jeux linguistiques montrent que le terme se décline aujourd’hui en fonction de l’usage qui en est fait et du public auquel il s’adresse. Passé l’effet de mode, les Mooc sont devenus une modalité d’enseignement parmi d’autres, pour les étudiants comme dans le cadre de la formation tout au long de la vie.
Vers des modèles en partie payants
Reste la question du modèle économique des Mooc, qui n’est pas encore résolue. Les plateformes commencent à mettre en place des services payants, dans une logique freemium. Moyennant finance, elles proposent le plus souvent de délivrer des certifications – ce qui pourrait aussi permettre de diminuer le taux d’abandon. Aux Etats-Unis, des pratiques similaires se développent autour de la correction de devoirs, l’animation de travaux de groupe ou l’accompagnement des étudiants à travers un tutorat personnalisé.
Mais c’est certainement du côté des entreprises que les marges de manœuvre sont les plus importantes pour les écoles et universités. Tout d’abord, parce que les Mooc peuvent permettre d’engranger directement des recettes (quand ils sont conçus sous forme de Cooc). D’autre part, ils peuvent faire office de produits d’appel vers un catalogue de modules payants. Mais encore faut-il que les écoles et universités investissent pleinement le champ de la formation continue, ce qui est loin d’être partout le cas. En attendant, des start-up se sont déjà lancées sur le créneau : cet automne, OpenClassrooms et Coorpacademy, spécialisées sur la formation professionnelle en ligne, ont réalisé des levées de fonds atteignant respectivement 6 et 10 millions d’euros.
2 Responses
Une culture générale étendue Une spécialité approfondie L a langue anglaise parfaitement parlée et comprise
+1 : Lorsqu’un salarié cherche au travers d’un MOOC à développer ses compétences professionnelles, sans disposer du temps libre nécessaire pour garder le rythme imposé, le fait de ne pas atteindre le niveau “certifiant” à la date butoir prévue par l’équipe pédagogique n’est pas un problème, encore moins un échec. L’important est d’atteindre le niveau de connaissance voulu, en s’octroyant si besoin des délais supplémentaires pour y parvenir.