Aux grands donateurs, les écoles reconnaissantes

Aux grands donateurs, les écoles reconnaissantes

Drahi X-Novation Center © École polytechnique – J.Barande

Vous avez toujours rêvé d’avoir un amphi à votre nom ? C’est désormais possible ! De plus en plus d’écoles proposent, moyennant quelques finances, de rebaptiser leurs locaux du nom de leurs généreux donateurs.
A l’occasion de son déménagement sur le plateau de Saclay prévu en 2019, Télécom ParisTech fait appel à des mécènes pour financer les équipements et le personnel du « collège de l’innovation par le numérique » qu’elle ambitionne de devenir. « Si la construction du bâtiment est déjà assurée par des fonds publics, nous avons besoin d’un soutien fort de nos alumni et de partenaires entreprises à hauteur de 5 M€ », explique l’école d’ingénieurs. Ceux-ci ont notamment la possibilité, contre quelques centaines de milliers d’euros, de donner leur nom à un espace du futur campus selon un processus de « naming » courant dans le monde du sport et qui se développe dans les grandes écoles françaises.

Traditionnellement, il était plutôt d’usage, et cela reste le cas dans les universités, de rendre hommage aux fondateurs de l’établissement ou à des scientifiques renommés. C’est notamment ce qu’a fait l’université Paris Sud l’année dernière, en rebaptisant dix de ses amphithéâtres du nom du mathématicien Jean-Pierre Kahane, de l’informaticien Charles Delorme ou des physiciens Yvette Cauchois et Jacques Fridel – des choix effectués après avoir lancé un sondage auprès de la communauté universitaire, signe de la charge symbolique du procédé.

40.000 € pour une salle de TP à Télécom, 300.000 pour un labo à l’X

Les grandes écoles, elles, sont davantage portées sur la pratique du naming qui est de plus en plus intégrée aux campagnes de levées de fonds : le « plan de reconnaissance » de l’Essec prévoit que les grands donateurs puissent, selon le montant de leurs dons, laisser leur nom à un espace de travail collaboratif (à partir de 100.000 €), une salle de cours (200.000 €) ou un amphithéâtre (350.000 €). De son côté, la fondation Supélec propose, pour 20.000 €, de donner son nom « pour au moins dix ans » à un siège du prestigieux amphithéâtre Janet (un physicien qui dirigea l’école au début du 20e siècle), avec la possibilité de choisir l’emplacement de celui-ci sur le plan, un peu comme on choisit une place de théâtre.

« Prenez place au cœur de l’Ecole », clame Supélec, tandis que Télécom ParisTech propose à ses mécènes de « signer le futur ». L’école a mis en ligne un plan des sept niveaux du futur bâtiment du plateau de Saclay, affichant les espaces disponibles et les tarifs correspondants : 15.000 € pour « signer » une salle de cours pour dix ans, 40.000 € pour une salle de TP, 250.000 € pour une salle de réception, 750.000 € pour un amphi… Des montants qui doublent pour une signature à vie.

“La pratique du naming est de plus en plus intégrée aux campagnes de levées de fonds des grandes écoles”

Pour sa deuxième campagne de levée de fonds lancée en novembre 2016, l’Ecole polytechnique a, elle aussi, développé une stratégie de naming : présentée comme « un signe de reconnaissance », celle-ci est mise en place « à tous les niveaux de dons », permettant de voir son nom associé à « un espace ou un objet » en fonction du montant consenti : un fauteuil d’amphithéâtre (5.000 € pour une durée de dix ans, 15.000 € à vie), une salle de classe (150 ou 300.000 €), un nouveau laboratoire de recherche (300 ou 600.000 € à vie), voire l’une des entrées vers le grand hall rebaptisée à vie pour la bagatelle de 2 millions d’euros.

L’X compte quelques grands patrons parmi ses plus opulents donateurs, dont les noms sont désormais attachés au campus : après le stade de rugby Claude Bébéar inauguré en 2011, l’X héberge depuis 2016 le Drahi X-Novation Center, suite aux 5 millions d’euros donnés par le patron d’Altice pour financer le programme d’entrepreneuriat de l’école. Patrice Drahi et son épouse Lina soutenant par ailleurs « un ambitieux programme de Mooc et de bourses pour des étudiants internationaux » à Télécom ParisTech (l’école d’application du tycoon après l’X), le plan du futur campus à Saclay prévoit qu’un jardin porte leur nom. Mais que les potentiels donateurs se rassurent : trois patios sont encore disponibles.

 

4 Responses

  1. MaMa says:

    Pratique qui a lieu depuis très longtemps dans certaines universités étrangères, principalement dans le monde anglo-saxon.
    Le plus troublant étant le naming d’une chaire, puisqu’on peut se retrouver avec quelquechose du genre “Jean TARTEMPION, Louisette & Georges MACHIN-TRUC Chair Professor”, bref avec un prof qui doit mentionner le nom de ses “mécènes” à tout bout de champ… pas toujours compréhensible, hors contexte !

  2. Wouarf.... says:

    Sur le campus de l’X, le truc de Drahi ressemble à un méchant Algeco… si l’X veut attirer des sponsors faudrait peut etre faire un peu moins prolo. Bon, il faut dire que ca ne dépareille pas dans l’horreur architecturale absolue que sont les batiments hétéroclites et hideux de cette école. Et, j’imagine qu’à grand coups de défiscalisation le sponsoring de Drahi ne lui aura pas coûté cher non plus..

  3. Hellmouth Côlle says:

    Très bel exemple d’endogamie de “l’élite” nous donnant de belles et heureuses maladies congénitales et nous menant vers un futur toujours plus radiant ! Continuons, nous sommes dans la bonne direction ! Nous espérons toutes-tous voir un naming d’amphi “Anne Lauvergeon” ou “Patrick Stéphane Kron” ou “Jean-Yves Haberer” dans nos grandes et belles écoles d’ingénieurs et de commerce !

  4. AncienTelecomAbasourdi says:

    Qui a décidé d’autoriser de telles choses ! Qu’en pensent les élèves, les professeurs ? Pourquoi passer par un tel financement ?

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